La méditation sans mots
On ne peut jamais entreprendre une méditation ; elle doit se produire sans qu'on la recherche. Si vous la recherchez ou si vous demandez comment méditer, la méthode non seulement vous conditionnera, mais elle renforcera votre conditionnement présent. La méditation, en réalité, est le déni de toute la structure de la pensée. La pensée est structurale, raisonnable ou déraisonnable, objective ou malsaine, et lorsqu'elle essaye de méditer par raison ou à partir d'un état contradictoire et névrosé, elle projette inévitablement ce qu'elle est, et prend sa structure pour une grave réalité. C'est comme le croyant qui médite sur sa propre croyance : il renforce et sanctifie ce qu'il a créé lui-même, poussé par sa peur. Le mot est l'image ou le tableau, objet d'une idolâtrie qui devient la pensée essentielle.
Le bruit construit sa propre cage sonore. Il en résulte que le bruit de la pensée provient de la cage, et c'est ce mot et sa sonorité qui séparent l'observateur et l'observé. Le mot n'est pas seulement un élément du langage, il n'est pas un simple son, c'est aussi un symbole, le rappel de tout souvenir susceptible de déclencher le mouvement de la mémoire, de la pensée. La méditation est l'absence totale de ce mot. La racine de la peur est le mécanisme du mot.
J. Krishnamurti - La révolution du silence, 1970